Bleriot Baydikila

Comme tout salarié et comme tout travailleur français, les travailleurs étrangers nous apportent leurs compétences.
Le mot “étranger” a une image négative qui lui est attachée parce qu’on pointe la différence comme une menace. Alors que le mot “étranger” peut être un synonyme d’égalité, peut nous inciter à penser “l’autre” comme également important.
En tant que directeur d’entreprise, travailler avec des étrangers c’est modestement, à mon échelle, participer à un changement de perception et à un processus d’intégration. Je ne reçois pas particulièrement beaucoup de candidatures de personnes étrangères, en revanche lorsqu’il y en a, j’y accorde une attention spécifique. Ces personnes sont là, sur le territoire et c’est un engagement de les embaucher, c’est reconnaître notre rôle.
On croit souvent que l’entreprise est un monde inhumain, mais le lieu de l’entreprise, les équipes peuvent être un espace d’accueil et d’acceptation de la différence. Alors qu’il y a en ce moment un grand nombre de discours haineux, du rejet autour de l’immigration,
il me semble important de témoigner pour rappeler qu’on parle de personnes qui ont des compétences, qu’elles ne prennent pas le travail d’autres, qu’elles contribuent à la valeur de l’entreprise.
Cela requiert de la patience lorsqu’il y a des barrières comme celle de la langue, mais à mon sens c’est le minimum de donner une chance à des personnes qui sont compétentes, qui cherchent à apprendre et à être intégrées dans la société française.
L’entreprise peut être un pont parce qu’elle permet une rémunération et donc de pouvoir vivre de son travail. Ce n’est pas seulement ma vision, c’est une culture d’entreprise et des équipes qui partagent cette volonté. Peut-être parviendrons-nous ainsi à aller vers une société avec moins d’exclusion ?

CLAUDE PEIGNÉ GÉRANT DE TRANSPORT PEIGNÉ

“Un étranger, c’est celui qui n’a pas la nationalité du pays où il se trouve. Aujourd’hui, moi, je me trouve en France, je n’ai pas la nationalité française, je suis donc un étranger ici. Mais je ne me sens pas étranger en France. Je ne pense jamais à ça. Quand j’entends des gens qui disent “Les étrangers viennent nous piquer du boulot,
nous faire ceci, nous faire cela”, je les laisse dans leur coin. Je vis ma vie tranquille. Je suis bien. C’est pas une insulte le mot étranger.
Il y a des gens qui le prennent comme une insulte. Au Congo, il y a des Français et ce sont eux les étrangers ! On est des êtres humains. Avant de venir ici, j’avais un pays moi : ce n’est pas pour rien que j’ai quitté mon pays, ce n’était pas pour le plaisir.

J’aimerais avoir la nationalité française, mais j’oublie de la demander. Mais je le ferai ! Je veux finaliser tout ça un jour.
J’ai des enfants ici, ils sont nés ici, ce sont des Français, ils sont nés français, ma femme est française. Il n’y a que moi à la maison qui sois étranger. Peut-être que pour eux je le ferai. Mais ça prend du temps les papiers, avec le métier que je fais… Je roule de nuit,
je rentre, je dois dormir aussi. Et la préfecture, elle ferme tôt, elle ne va pas m’attendre (rires).

Le travail, ça me permet de subvenir à mes besoins, aux besoins de mes enfants, de ma famille. C’est avec ça que je vis, que je paie mon loyer. Je suis fier de ce que je fais. J’aime mon travail. C’était mon métier de rêves. Je voulais déjà le faire dès que je suis arrivé en France, mais je n’ai pas eu l’opportunité de faire la formation.
J’ai bossé. J’ai cotisé. Ma formation, je l’ai faite avec mes heures de CIF. J’ai été à l’école pendant six mois.
Ce qui m’a le plus étonné à mon arrivée en France ? La médecine !
C’est ça ! Ça m’a impressionné ! Respect ! Ici que tu aies des papiers ou que tu les aies pas, tu es traité, tu es soigné. Par exemple, il y a une maladie chez nous, la drépanocytose. Je ne savais pas que ça se soignait. Quand tu as cette maladie en Afrique tu n’arrives pas à atteindre l’âge de 40 ans. Ici, ça se soigne.

Trois mots pour définir le mot Étranger : travailleur, chercheur, touriste.”

BLERIOT BAYIDIKILA
46 ANS, PAYS D’ORIGINE : CONGO BRAZZAVILLE
CONDUCTEUR ROUTIER CHEZ TRANSPORT PEIGNÉ
ARRIVÉ EN FRANCE EN 2005