Roméo Tedongap

Il est indispensable d’être dans une dynamique de création de valeur qui soit
responsable et inclusive, et cela ne peut se faire qu’en étant ouvert à celles
et ceux qui nous sont a priori étrangers. Je suis absolument convaincu et je
le dis avec humilité et détermination, que cela réside dans notre capacité à tirer
le meilleur parti de la diversité sous toutes ses formes. Qu’entend-on par
“diversité” ? Une variété de cultures, de profils, de racines, de talents.
C’est une vision multiculturelle qui est la mienne et qui est celle de l’ESSEC.
Étant moi-même, un Italien en France contribuant au développement d’une
école de management française, ma vision d’une bonne intégration n’est
certainement pas de renoncer à ses racines, mais au contraire de les affirmer
sans en rester prisonnier. Le tout, en faisant en sorte qu’il y ait un échange mutuel et bénéfique. À l’ESSEC, il y a énormément de nationalités différentes et chacun et chacune avec ses racines contribue à cette approche multiculturelle que je résumerais ainsi : que peut-on s’apporter les un·e·s aux autres, et qu’est ce qu’ensemble on peut apporter au pays tout en apprenant de lui ?
Lorsqu’une personne agit, qu’elle est engagée, que ce soit dans sa vie professionnelle, au niveau politique ou associatif, sa contribution à la société crée de la valeur. Avoir de l’impact dans la société c’est créer de la valeur inclusive et responsable. La valeur dont je parle est sociale, environnementale, économique, humaine. Lorsqu’on pense par exemple à la croissance économique, une croissance responsable signifie ne pas se limiter au court terme, mais avoir une réelle vision à long terme. Une croissance inclusive signifie qu’elle profite au plus grand nombre. La diversité est un agent clé
de ce processus, la diversité de cultures et d’origines, mais aussi la diversité de professions, d’opinions, de genres, etc. Cette diversité ne doit jamais représenter une contrainte, mais au contraire être un levier de création de valeur. Elle génère de la performance tant économique que sociétale,
fait émerger de nouvelles idées et invite au partage. C’est une vision claire qui permet, je crois, d’être de meilleures personnes parce qu’on apprend toujours les un·e·s des autres. VINCENZO ESPOSITO VINZI DIRECTEUR GÉNÉRAL DE L’ESSEC

“Pour moi, on n’a qu’une seule nationalité, celle d’origine. Après, je suis devenu citoyen canadien, citoyen suédois, car il faut être un bon citoyen pour être bien
intégré. J’ai été très bien intégré dans tous ces pays-là !
J’ai fait plusieurs pays avant de venir en France. Je ne dis pas que je vais finir ma vie en France. Il est même probable que je ne la finisse pas ici, que je reparte
après et lorsque j’irai ailleurs (ce ne sera sans doute pas le Cameroun), je serai encore traité d’étranger et quand je partirai ailleurs… donc je serai étranger
partout où j’irai. (Rires). Il suffirait simplement que l’on considère que le monde est un village planétaire. C’est une notion que j’aime bien. Si le monde était un
village planétaire, le mot “étranger”, on n’aurait pas à l’utiliser de manière aussi moribonde qu’on le fait aujourd’hui.

Pourtant “étranger”, c’est un très beau mot. Parce que, ne l’oubliez pas, on est étranger pour les lieux qu’on vient de connaître, pour les choses qu’on vient
de découvrir, mais après un temps, on devient familier à ces choses-là. Le mot “étranger”, il est beau au départ parce qu’il décrit une découverte. Pourquoi
est-ce qu’on voyage ? C’est pour découvrir, pour découvrir de nouvelles cultures, de nouvelles personnes, de nouvelles idées. En fait, c’est pour
découvrir “l’étranger” qu’on voyage (rires). On voyage pour découvrir l’étranger et finalement on se sent étranger en voyageant : c’est le paradoxe !
Je suis dans une profession qui forme: on forme la jeunesse, on aide les jeunes à acquérir une bonne carrière dans les études qu’ils ont choisies de faire, le
Commerce en ce qui me concerne. Mon rôle en tant qu’intellectuel, c’est d’observer la Société, regarder ce que peuvent être les dysfonctionnements,
voir ce qu’on peut améliorer, proposer des solutions et établir de manière scientifique que ce sont des solutions tout à fait abordables.

Ce qui m’a le plus étonné à mon arrivée ? L’inefficience de l’administration. On a eu beaucoup de peine avec l’administration. D’ailleurs ça continue aujourd’hui !
Trois mots pour définir le mot étranger ? La xénophobie, la différence, la diversité.
Après chacun ira chercher là-dedans pour trouver celui qui lui correspond !
J’aime votre démarche, j’ai accepté sans hésiter ! Il s’agissait pour moi de le faire de manière militante, pour qu’on ne perde plus de temps sur des choses qui
sont complètement inutiles et qu’on essaie plutôt de considérer que, lorsqu’on est dans une société, ce qu’on reproche aux gens ou ce qu’on apprécie chez eux
ne dépend ni d’où ils viennent ni où ils vont.”

ROMÉO TEDONGAP
42 ANS, PAYS D’ORIGINE : CAMEROUN
PROFESSEUR DE FINANCE, DOYEN ASSOCIÉ,
DIRECTEUR DE LA RECHERCHE À L’ESSEC
ARRIVÉ EN FRANCE EN 2015.